Le devoir de mise en garde de la banque
Publié le :
17/10/2023
17
octobre
oct.
10
2023
Création issue de la jurisprudence, le devoir de mise en garde du banquier impose à ce professionnel, d’informer son client qui contracte un prêt auprès de son établissement, des risques de surendettement, eu égard sa situation financière.
À défaut de respecter cette obligation, et si l’emprunteur n’est plus en mesure de faire face au remboursement du crédit, le banquier peut être poursuivi et voir sa responsabilité engagée sur la base d’une faute : celle du manquement à son devoir de mise en garde.
Qui est en mesure d’engager la responsabilité du banquier ?
Seuls les emprunteurs et les cautions non avertis sont susceptibles d’engager la responsabilité d’une banque, sur le fondement du manquement au devoir de mise en garde.
L’emprunteur non averti est considéré par la jurisprudence, comme le consommateur qui n’est pas en mesure d’apprécier le risque d’endettement excessif lié à la souscription d’un prêt, à l’instar de ceux qui ne disposent d’aucune expérience dans le secteur de la finance (Cass. 27/032019, n°18-10.592).
Du côté de la caution, le même raisonnement est retenu et est consacré à l’article 2299 du Code civil puisque le professionnel est tenu de mettre en garde la caution personne physique lorsque l'engagement du débiteur principal est inadapté aux capacités financières de ce dernier. Le caractère profane ou non averti de la caution, s’apprécie en fonction des compétences dont elle peut disposer pour apprécier les risques liés au cautionnement. À titre d’exemple, peut être considérée comme avertie, la caution qui exerce ou a exercé des fonctions de direction, ou une profession qui lui aurait permis de bénéficier de conseils spécialisés en la matière, comme les professionnels du droit.
Comment s’apprécie le manquement au devoir de mise en garde de la banque ?
Face à un emprunteur profane ou à l’engagement d’un garant non averti, lorsque la contraction du prêt n’était pas adaptée à ses capacités financières, ou lorsque l’engagement du débiteur principal apparaissait comme inadapté aux capacités financières de ce dernier, mais que la souscription du crédit a quand même eu lieu, la responsabilité de la banque ne pourra être engagée que s’il est démontré qu’elle a manqué à son devoir de mise en garde sur ce point.
La charge de la preuve pèse ici sur la banque, qui doit être en mesure de justifier « avoir satisfait à cette obligation à raison des capacités financières de l'emprunteur et des risques nés de l'octroi du prêt » (Cass. chambre mixte, 29/06/2007 n°05-21.104).
Afin de veiller au respect du devoir de mise en garde, le banquier peut s’appuyer sur les dispositions du Code de la consommation, en procédant, avant la conclusion du contrat de prêt, à une évaluation rigoureuse de la solvabilité de l'emprunteur fondée sur des facteurs pertinents permettant d'apprécier la capacité de l'emprunteur à remplir ses obligations définies par le contrat de crédit.
À ce titre, le prêteur s'appuie sur des informations nécessaires, suffisantes et proportionnées relatives aux revenus et dépenses de l'emprunteur ainsi que sur d'autres critères économiques et financiers, recueillis auprès de sources internes ou externes pertinentes, y compris de l'emprunteur.
La signature d’un document écrit attestant de la prise en compte de ces éléments, par les parties, est par conséquent fiable pour démontrer que la banque a satisfait à son obligation.
Quelles sont les conséquences du manquement au devoir de mise en garde ?
Si la banque est tenue de fournir la preuve du respect de son devoir de mise en garde, l’emprunteur doit quant à lui justifier que le prêt accordé lui a fait courir des risques relatifs à sa situation patrimoniale et financière.
L’emprunteur qui justifie de l’existence d’un risque d’endettement excessif au jour de la conclusion du prêt dispose alors de cinq ans à compter du premier incident de paiement pour engager une action, sinon former une demande reconventionnelle contre la banque qui l’a assigné en paiement, afin d’obtenir l’indemnisation de son préjudice.
Concernant la caution, le non-respect de la banque du devoir de mise en garde a pour effet une déchéance de son droit contre la caution à hauteur du préjudice subi par celle-ci.
Historique
-
Le devoir de mise en garde de la banque
Publié le : 17/10/2023 17 octobre oct. 10 2023Articles du cabinetCréation issue de la jurisprudence, le devoir de mise en garde du banquier impose à ce professionnel, d’informer son client qui contracte un prêt auprès de son établissement, des risques de surendettement, eu égard sa situation financière. À défaut de respecter cette obligation, et si l’emprunte...
-
Le délit de subornation de témoins
Publié le : 13/09/2023 13 septembre sept. 09 2023Articles du cabinetJuridiquement, le délit de subornation de témoin constitue une entrave à l’exercice de la justice, par conséquent toute tentative visant à contraindre un témoin à modifier sa version des faits, sinon à se rétracter en tant que témoin, est punie pénalement. La définition du délit de subornation d...
-
Modalités de calcul et de fixation de la prestation compensatoire
Publié le : 18/07/2023 18 juillet juil. 07 2023Articles du cabinetLa prestation compensatoire prend la forme d’un capital versé par un ex-époux, au bénéfice du second, alors que le divorce a été prononcé, afin de combler les disparités causées par la rupture du mariage. De nombreuses conditions entourent la fixation, le montant et le versement de cette prest...
-
La nouvelle aide financière aux victimes de violences conjugales
Publié le : 02/06/2023 02 juin juin 06 2023Articles du cabinetFin février, le Sénat a adopté à l’unanimité la proposition de loi visant à créer une aide universelle d’urgence financée par l’État, versée sous quelques jours aux victimes de violences familiales. En vigueur depuis le 1er mars 2023, ce dispositif d’urgence qui tend à éviter le retour de la v...
-
A quoi correspond la notion de "détenus particulièrement surveillés" en droit pénal
Publié le : 25/04/2023 25 avril avr. 04 2023Articles du cabinetLe droit pénal français distingue un statut spécifique réservé à une certaine catégorie de détenus : les détenus particulièrement surveillés, aussi connus sous l’acronyme DPS. Cette appellation initialement réservée aux détenus liés au crime organisé et au grand banditisme, regroupe aujourd’hui...
-
Validité de l'action en responsabilité engagée par la caution en cas d'absence de réception de la mise en demeure du créancier
Publié le : 09/03/2023 09 mars mars 03 2023Articles du cabinetAfin d’appeler en garantie la caution d’un débiteur défaillant, le créancier est tenu de préalablement mettre en demeure celle-ci d’exécuter les obligations de paiement, en lieu et place du débiteur. À compter de cette mise en demeure, la caution dispose alors de moyens d’action avant que soient...